MANIFESTE SUPPORT/SUJET
Cette recherche se fonde sur une expérience de plusieurs années, qui a fini par aboutir à ce concept SUPPORT/SUJET, tissant des liens étroits entre le support matériel réinventé des œuvres picturales, et le, ou les, sujet(s) plus ou moins narratif(s), susceptible(s) d’entretenir un dialogue interne le plus nourri possible avec son identité plastique (tissu, papier, écorce, etc…).
Tout a commencé en 1996 quand j’ai éprouvé le besoin de faire ma propre série de portraits du Fayoum, l’adaptant à mes contemporains, plus précisément à mon entourage d’amis. Il s’agissait de brosser des portraits de femmes et d’hommes « dans l’esprit de », sans aucune vocation métaphysique avec l’au-delà, même si trois des personnes représentées sont actuellement décédées. Le mari de l’une d’entre elles a d’ailleurs refusé que je lui cède son portrait à titre posthume.
Le médium était déjà préexistant à ces peintures, puisque je peignais déjà à la cire et à l’huile, comme le pratiquaient les peintres du Fayoum. En revanche, j’ai créé chaque support en superposant des bandes de tissu sur de petits formats, pour augmenter « l’effet bandelettes » des momies. On peut dire que d’une certaine façon, le concept « support/sujet » était embryonnaire. Cela n’avait plus rien à voir avec le support d’un élément de porte marocaine que j’avais au Maroc « emprunté » pour y imaginer dessus le portrait néo-antique de Juba II (années 80-90).
En règle générale, je peignais sur des supports classiques, toiles et gesso, parfois préparées de A à Z à partir de lin ou de coton vierge, tendues sur châssis. Cela dit, je n’ai jamais abandonné cette pratique, tant il me semble que pour le moment n’importe quel sujet, à commencer par l’abstraction, peut s’adapter à ces supports classiques, notamment pour créer des effets d’épaisseur, ou au contraire de transparence par glacis.
Et s’il m’est arrivé de peintre sur carton d’emballage (marouflé sur châssis) en 2013, cet emprunt d’un nouveau support recouvert de gesso n’est pas intervenu complètement dans le rapport avec le sujet choisi, en l’occurrence une fleur de bananier et son régime. Néanmoins, les timbres du Cameroun photocopiés en agrandi, encollés sur le côté de la peinture, attestaient de cette volonté de sortir du cadre et de faire de cette peinture sur carton visible et gaufré une sorte d’évocation nostalgique des enveloppes en kraft dont on décollait amoureusement les timbres au Cameroun. Une correspondance secrète était établie dès lors entre le sujet des timbres (la récolte des bananes) et le sujet choisi (fleur et régime). C’était la base de ce qui allait sept ans plus tard ressurgir, établissant des rapports de connivence secrète entre tous les éléments, du support aux sujets, par un jeu de mise en abîme.